POLLUTION INCESSANTE DANS L’ISERE : UNE FILIALE DE LACTALIS ENFIN CONDAMNEE
Publiée le 23/05/2019 France Nature Environnement
Quatre litres par seconde : c’est la quantité de substances polluantes déversée par la fromagerie
Etoile du Vercors dans un cours d’eau, l’Isère, en continu depuis 1942. Une pollution colossale,
pour laquelle cette filiale du premier groupe mondial laitier et fromager Lactalis vient enfin d’être
condamnée à 100 000 € d’amende dont la moitié avec sursis. Un montant loin de compenser les
dommages sanitaires et environnementaux pour France Nature Environnement et la FRAPNA Isère,
qui rappellent qu’à ce jour, le rejet de ces substances toxiques n’a pas cessé.
Lactalis fait des économies sur le dos de l’environnement
On aurait pu croire que le rachat de l’Etoile du Vercors par un grand groupe ayant pignon sur rue en 2011
allait conduire rapidement à l’assainissement des effluents de cette fromagerie. Il n’en a rien été : loin de
se soumettre aux différentes injonctions de l’administration à régulariser sa situation, Lactalis les a au
contraire déférées devant le tribunal administratif de Grenoble. Le premier groupe mondial laitier n’a, en
parallèle, pris aucune mesure pour limiter la pollution de l’Isère.
Fort heureusement, la justice administrative a, le 28 décembre 2018, mis en demeure la société Etoile du
Vercors de mettre en oeuvre une solution de traitement de ses effluents dans un délai de neuf mois à
compter de cette date. Mais surtout, un procès a eu lieu devant le tribunal correctionnel, mettant en lumière
la gravité de la pollution : chaque année, 200 tonnes de produits sont déversées dans le cours d’eau, dont
28 substances chimiques comme l’Hypochlorite de soude 47/50, un extrait de javel très toxique pour les
organismes aquatiques, ou encore le PENNGAR NPH, un nettoyant liquide acide oxygéné, apprécié de
l’industrie agro-alimentaire pour sa puissante action dégraissante et oxydante.
La condamnation signera-t-elle la fin des pollutions ?
Le 8 avril 2019, le Tribunal correctionnel de Grenoble a donc condamné la société à 100 000 € d’amende
dont la moitié avec sursis. La société devra également verser 55 000 € à l’ensemble des parties civiles pour
les préjudices subis par chacune, dont France Nature Environnement et la FRAPNA Isère.
Cette condamnation était très attendue par le monde associatif, qui dénonce depuis de nombreuses années
le comportement de l’industriel. Mais loin des 500 000 € d’amende requis, il ne s’agit malheureusement pas
d’une condamnation exemplaire, susceptible de dissuader d’autres industriels.
Est-ce que cela va au moins permettre de rapidement mettre fin aux pollutions, ou bien faudra-t-il entamer de nouvelles démarches ? France Nature Environnement et la FRAPNA Isère exhortent Lactalis à enfin prendre ses responsabilités. Pour l’heure, la pollution du milieu aquatique se poursuit. Officiellement, la société a jusqu’au 28 septembre 2019 pour stopper ses rejets toxiques.
« C’est à la fois une victoire et un constat d’échec, car si la justice et ses répercussion médiatiques semblent pouvoir inciter ce géant du monde économique à enfin respecter la réglementation environnementale, la pollution n’a pour l’heure pas cessé. Ce groupe industriel préfère-t-il payer des amendes pour pollution, plutôt que de se mettre en règle ? Lactalis a les moyens de prendre les mesures qu’il faut dès demain pour arrêter de polluer ce cours d’eau et il faut le faire savoir ! », explique Anne Roques, juriste à France Nature Environnement.